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11 novembre 2010 4 11 /11 /novembre /2010 10:41

Mediapart.fr - 10 Novembre 2010 Par Stéphane Alliès

Ambiance feutrée et fleurets mouchetés, au conseil national du PS, au moment pour le parti de lancer sa convention sur l'égalité réelle. Si l'ambition du texte a été préservée, les postures ne s'en sont pas moins aiguisées, dans un climat un poil tristoune. C'est l'eurodéputé Stéphane Le Foll qui a réveillé l'ambiance. A 20h15, le lieutenant de François Hollande s'est précipité vers les journalistes pour annoncer le résultat des votes: 59 votes pour, 12 abstentions. Et de souligner la faible participation (le conseil national compte plus de 300 membres, 150 étaient présents à l'ouverture des débats à 17h30), signe selon lui de l'enthousiasme tout relatif qui accueille le texte présenté par le porte-parole Benoît Hamon.

Outre les amis de l'ancien premier secrétaire, Pierre Moscovici et Manuel Valls ont fait partie des abstentionnistes, eux restés jusqu'au bout. Benoît Hamon préfère en plaisanter: «Ça m'a fait penser à l'époque des coordinations étudiantes, quand on restait jusqu'au bout dans l'espoir d'emporter des majorités à l'usure.» L'«ailier gauche» du PS tient à contextualiser la défection: «C'est le problème de telles réunions un mardi soir, c'est compliqué pour venir des régions, et ceux qui viennent reprennent des trains…»

De son côté, le député François Lamy, proche de Martine Aubry, conteste la lecture des événements faite par Stéphane Le Foll en maniant l'ironie: «Ce n'est pas sérieux, ou alors ça veut dire que l'opposition du PS, ça ne représente que douze personnes au conseil national. Si on avait voulu, on aurait pu faire des procurations, mais franchement, l'important de cette soirée, ce sont les idées, non?»

Pour les exégètes de la phraséologie socialiste, le texte n'a été modifié qu'à la marge la veille durant la nuit. (Lire ici la dernière version en PDF, et là notre premier article.) Jusqu'à 2 heures du matin, la commission de résolution a débattu et amendé le texte initial rédigé par le porte-parole du PS. «Il y a surtout eu des reformulations et des précisions plutôt que des idées supplémentaires, explique-t-on au cabinet de Martine Aubry. Il a fallu colorer le vocabulaire de gauche de Benoît, en faire plus sur “l'Etat prévoyant” plutôt que sur “l'Etat stratège”.»

Sur le fond, les principaux ajustements ont touché à l'intégration progressive des grandes écoles aux universités (et non plus la fusion d'emblée), le positionnement en faveur du paiement au forfait des médecins généralistes a été «musclé», au rabaissement de l'âge obligatoire d'inscription en maternelle dès 3 ans (au lieu de 4). Quant aux «contrôles des contrôles policiers» via un système d'attestation, il est devenu anonymisé pour les policicers et sera d'abord expérimenté. Au final, c'est l'allocation d'autonomie des jeunes qui a été le plus sensiblement retouchée, désormais transformée en parcours d'autonomie (prenant mieux en compte l'ensemble de la population, étudiante ou non), au grand contentement du MJS qui plaidait en ce sens.

«On ne choisit pas entre le sérieux et le progrès»

Autre grande satisfaction collective, sans arrière-pensées pour le coup, le «nouveau pacte éducatif» n'a reçu que des louanges de la part de l'ensemble des dirigeants socialistes, de même que les propositions en matière de santé. Critiqués pour son absence de hiérarchisation des propositions, ces deux domaines ont été définis comme des priorités, avec la jeunesse et le logement, dans une synthèse de quatre pages distribuée à la presse au début de la réunion. «Mais ce n'est pas le texte, c'est un tract, un argumentaire», s'agace le député «hollandais» Michel Sapin quand on le lui tend. Stéphane Le Foll renchérit: «La direction donne un texte dans des délais très courts, c’est pratiquement à prendre ou à laisser. C’est un peu compliqué de faire ça.» Mais il concède: «Ce n’est pas la peine de cacher qu’on n’est pas d’accord sur tout mais, en même temps, on n’est pas là pour faire un débat interne qui aurait peu de sens aux yeux des Français aujourd’hui. Le vrai choix se fera au moment des primaires.» D'où l'abstention.

Quant au procès en non-financement des propositions, il a provoqué quelques effets de tribune et de coulisses de la part de l'entourage de Martine Aubry et Benoît Hamon. «Si on regarde le projet socialiste de 2006, sous la direction de François Hollande, on voit que la suppression de la réforme Fillon sur les retraites s'élevait à 10 milliards d'euros. Alors parlons-en des chiffrages responsables…», persifle-t-on.

Lors de son discours d'ouverture du conseil national, la première secrétaire a elle aussi glissé quelques allusions au débat sur la crédibilité du PS, dont certains doutent: «Je le dis simplement: quand on est de gauche, on ne choisit pas entre la rigueur et la justice, on ne choisit pas entre le sérieux et le progrès.» Puis: «L’égalité réelle, c’est la véritable crédibilité. Nous ne serions pas crédibles si nous continuions à expliquer que, avec les socialistes, nous allons faire en sorte que l’égalité arrive sans innover.»


Martine Aubry au conseil national égalité réelle
envoyé par PartiSocialiste. - L'info internationale vidéo.

Martine Aubry a fait le lien entre cette convention nationale et «la sortie du mouvement contre la réforme des retraites qui n'est pas un abandon»: «Il y a la place pour de nouvelles réponses. C’est ce que nous faisons aujourd’hui. Nous ne sommes pas en train de recycler les réponses de 1980 et 1997, qui étaient adaptées à la période du moment. Nous sommes véritablement en train de repenser ce que nous devons dire aujourd’hui en gardant les flambeaux des grands combats de la gauche.»


Benoit Hamon au conseil national égalité réelle
envoyé par PartiSocialiste. - L'info video en direct.

Benoît Hamon a lui tenu à rassurer ceux parmi ses camarades qui redoutent de se déporter trop à gauche, ou plutôt s'éloigner de «l'esprit de responsabilité», en réaffirmant que l'éventail de propositions contenues dans son texte se veut «une boîte à outils pour notre futur candidat», qui pourra y piocher à sa guise.

Logique compétitive

Arrivé en retard, Olivier Ferrand, fondateur du think-tank Terra Nova, ne résiste pas à l'analyse de circonstance. Alors qu'il revient juste de Washington où il a planché avec Arnaud Montebourg sur les futures primaires auprès des démocrates américains, il note le «prépositionnement qui se joue actuellement en vue des primaires: Valls, Hollande et Moscovici sont déjà en campagne et cherchent à se démarquer et ont entamé la logique compétitive».

Si l'on poursuit le raisonnement, on constate qu'aubrystes, hamonistes et strauss-kahniens font corps, en attendant que «DSK» ou «Martine» se décide. Tandis que Ségolène Royal reste à distance de l'activité du parti, tout en construisant de son côté les conditions d'une victoire surprise. «Il y a un peu de tout dans ce texte mais les propositions de Ségolène sur l'emploi, qui reste à ses yeux la priorité, ont été très bien accueillies», reconnaît Guillaume Garot, le porte-parole de Ségolène Royal.

On a ainsi eu droit, entre les vestiaires et l'ascenseur, figurant le hall d'attente devant les portes closes, à des assauts d'amabilités (hommage sur le blog de Jean-Christophe Cambadélis à Benoît Hamon, compliments répétés de l'entourage de ce dernier sur la qualité de débat avec la strauss-kahnienne Marisol Touraine), à des amendements de Ségolène Royal intégrés sans barguigner et même avec entrain (par exemple son dispositif d'aide à la création d'entreprise pour les jeunes), ou à des éloges de chacun sur le discours de Vincent Peillon.

Désormais, le texte doit être discuté et voté dans les sections socialistes, et Benoît Hamon assure que la désaffection militante rencontrée lors des dernières conventions pourra être évitée: «Ce week-end, j'ai débattu à Brest devant 150 personnes des inégalités dans la santé publique. Je suis convaincu que le fond va intéresser les militants.» En espérant que l'appareil socialiste parviendra à mieux mobiliser sa base que ses hiérarques

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